Le « journalisme augmenté » en 10 points
La réalité augmentée est un enrichissement de notre environnement immédiat par des valeurs ajoutées. Tentons de définir ce que pourrait être « le journalisme augmenté », un nouveau journalisme enrichi de valeurs qui n’ont rien de virtuelles.
1 – Le journalisme augmenté de l’audience
Les insurgés ont pris la parole ! La prise de contrôle des moyens de production et de distribution des médias traditionnels par ceux qui en étaient privés (seule révolution marxiste réussie à ce jour !) entraîne la démocratisation de l’écriture et met fin au journalisme de surplomb, au journalisme de magistère. Elle permet aussi le « crowdsourcing » (collecte d’informations et témoignage sont partagés avec le public) et le « crowdfunding » (le financement aussi). Les médias parlent aux médias !
2 – Le journalisme augmenté de ses pairs
Lâcher prise sur ses contenus et laisser les contenus extérieurs entrer. Les rédactions, souvent conservatrices, ont de moins en moins une mentalité de bunker et s’ouvrent davantage au reste du monde, voire à leurs concurrents. Les collaborations entre médias se multiplient. Le journalisme en réseau et le journalisme mutualisé ont un bel avenir.
3 – Le journalisme augmenté des liens
Les métadonnées et l’hypertexte permettent le journalisme de liens, le journalisme de tri sélectif, le journalisme dépollueur, le news jockey ! Celui qui choisit, guide, réduit l’infobésité, trouve le signal dans le bruit.
4 – Le journalisme augmenté des autres corps de métiers
Visualisation de données, journalisme de données, journalisme visuel, web documentaires, web reportage, etc. Autant de nouvelles formes de narration qui associent le travail des designers, des développeurs et des journalistes. Ceux qui réussiront à faire travailler ensemble ces corps de métiers prendront de l’avance.
5 – Le journalisme augmenté d’innovation et de nouvelles technologies
Le journalisme web n’est pas la mise en ligne des contenus des journaux ou des télévisions. Une écriture différente est indispensable pour être en prise avec les nouveaux usages de la révolution de l’information. La chance est aussi d’y pouvoir profiter des nouveaux outils. Pour ce mode de représentation du réel, le digital storytelling de demain, le récit numérique, comprend déjà la géolocalisation, la cartographie animée, la réalité augmentée, la 3D, etc.
6 – Le journalisme augmenté de valeur ajoutée
Context is King ! Savoir relier les faits : face à la banalisation croissante de l’information, la valeur est dans la mise en perspective rapide des faits. Non seulement, collecter, éditer, hiérarchiser et distribuer ne suffit plus, mais il faut désormais aussi analyser les informations avec un degré de vitesse, jusqu’ici réservé aux seuls factuels. Les journalistes traditionnels font une erreur s’ils croient que leur capacité à collecter et à organiser les faits continuera à les rendre indispensables.
Pour rester pertinent, il ne suffit plus en outre de donner les informations de la veille ou du jour même, connus de tous, mais d’offrir du contexte, de la perspective, de l’analyse pour aider le public à saisir l’importance des événements, pour lui et la société, à regarder de l’avant, à anticiper la suite.
Il faut enrichir l’information, de manière éditoriale et technologique.
7 – Le journalisme augmenté du packaging
Les beaux médias ! La forme, c’est le fond qui remonte à la surface ! (Victor Hugo). C’est aussi la qualité de l’accès au contenu qui fera la différence.
Dans une économie de l’attention, où l’abondance des contenus a remplacé leur rareté, le temps de cerveau disponible sera de plus en plus dur à capter et à conserver ! Soigner le design de l’information devient crucial. D’autant que se multiplient aussi les nouveaux supports et plateformes de distribution (smartphones, tablettes, encre électronique …).
8 – Le journalisme augmenté de formations, de nouveaux métiers et d’entrepreneuriat
Pas facile d’apprendre à faire du vélo à 50 ans ! Mais il faut s’y mettre et se former. La révolution de l’information n’attend pas. D’autant que de nouveaux profils sont apparus ces dernières années dans les petites annonces : les journaux, magazines ou télévisions recherchent aussi désormais des éditeurs de métadonnées, des éditeurs spécialisés en moteur de recherche, des community managers, des journalistes visuels, des agrégateurs, des remixeurs, des facilitateurs, etc.
La facilité de créer une unité éditorial pour un coût initial presque nul (plus besoin d’imprimerie, de camions pour livrer les journaux ou de stations de TV) incite déjà ceux qui ont de bonnes idées à passer à l’acte et à monter leur média, seul ou en petit groupe.
9 – Le journalisme augmenté d’expérimentations
Difficile de faire désormais sans une cellule de R&D, un médialab, pour répondre à la vitesse des changements dans la profession et profiter des opportunités offertes par les nouvelles technologies. Restera à tester les nouvelles idées et à prendre des risques sans être tétanisé par la crainte de l’échec. Vive le bêta !
10 – Le journalisme augmenté de la confiance
C’est la mission la plus difficile, mais la plus importante dans une société où la défiance envers les corps constitués croît à toute vitesse.
Images CC Elsa Secco et Flickr Matthew Clark Photography & Design
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