OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Google m’a supprimé http://owni.fr/2011/08/29/google-suppression-compte-donnees-personnelles-vie-privee-god/ http://owni.fr/2011/08/29/google-suppression-compte-donnees-personnelles-vie-privee-god/#comments Mon, 29 Aug 2011 14:21:49 +0000 aKa (Framasoft) http://owni.fr/?p=76455 Thomas Monopoly a vu son compte Google, et ceux qu’il avait associés, désactivés du jour au lendemain, sans qu’il ne soit averti. Fâcheuse aventure qu’il raconte ici. Son compte, fermé pour des raisons de violation des conditions d’utilisation, a été réactivé depuis. Artiste, l’auteur a monté une exposition – numérique – il y a trois ans intitulée “L’évolution du sexe” et dans laquelle il avait inséré  une photo “à la limité de la légalité“. Qui ne lui appartenait pas. Cette exposition avait pour but de souligner la violence et l’absurdité croissante de la pornographie. Google avait donc décidé de supprimer son compte sans préavis. Explications sur son blog.

Vous vous réveillez un matin et constatez la disparition de la totalité de votre vie numérique !

Plus de mails, plus de contacts, plus de photos, plus de vidéos, plus de documents, plus de calendrier, plus de blog, plus de favoris, plus de flux RSS… tout, absolument tout, s’est évanoui !

De la science-fiction ? Non, un simple compte Google désactivé unilatéralement et sans préavis par la société.

En l’occurrence le compte de Dylan M. (@ThomasMonopoly sur Twitter) qui avait décidé peu de temps auparavant de tout faire migrer sur son unique compte Google. Compte sur lequel étaient attachés les nombreux services qu’offre la firme de Mountain View : Gmail, Picasa, Google Docs, Calendar, Reader, Blogger, etc.

Et ce sont donc ici sept années digitales qui partent en fumée d’un simple clic. Adieu données personnelles. Ce n’est alors pas uniquement votre identité numérique qui vacille, mais votre identité toute entière…

Cette triste ou effroyable histoire vraie est malheureusement riche d’enseignements. D’abord parce qu’elle peut arriver à n’importe quel possesseur d’un compte Google. Mais aussi et surtout parce qu’elle en dit long sur ce que nous acceptons tacitement lorsque nous décidons de faire confiance à ces “sociétés du nuage” en nous inscrivant, le plus souvent gratuitement, à leurs services en ligne. Et il va sans dire que Facebook, Twitter ou Apple ont, toutes, le droit d’en faire autant.

Exaspéré et désespéré, Dylan M. a conté sa mésaventure dans une longue lettre ouverte à Google, que vous trouverez traduite ci-dessous. Une lettre publiée sur… TwitLonger et non sur son blog, puisque ce dernier était sur Blogger et dépendait lui aussi de son compte Google !

De quoi faire réfléchir non seulement sur les pratiques du géant Google mais également sur le monde dans lequel nous avons choisi de vivre…

Je vous laisse, j’ai quelques sauvegardes urgentes à faire sur mon disque dur.


“Cher Google…”, Thomas Monopoly, 22 juillet 2011, TwitLonger

Cher Google,

Je voudrais attirer votre attention sur quelques points avant de me déconnecter définitivement de tous vos services.

Le 15 juillet 2011 vous avez bloqué la totalité de mon compte Google. Vous n’aviez absolument aucune raison de faire cela, même si votre message automatique me disait que votre système avait repéré une “violation”. Je n’ai en aucun cas violé les Conditions Générales d’Utilisation, que ce soit celles de Google ou celles spécifiques au compte, et votre refus de me fournir une quelconque explication ne fait que renforcer ma certitude. Et je souhaiterais vous montrer les dégâts que votre négligence a causés.

Mon compte Google était lié à presque tous les produits que Google a développés, ce qui veut dire que j’ai aussi perdu tout ce qui était dans ces comptes. Je venais aussi d’entreprendre de tout regrouper sur un seul compte Google. En fait, j’avais réfléchi à tout cela voici quelques mois et avais décidé que Google était une entreprise sérieuse et digne de confiance. Donc j’ai tout importé de mes autres comptes Hotmail, Yahoo…, dans mon unique compte Gmail. J’ai passé environ quatre mois à migrer lentement toute ma présence en ligne : comptes email, informations bancaires, documents professionnels, etc., dans cet unique compte Google, l’ayant déterminé comme étant fiable.

“C’est quelque chose qui me dépasse complétement”


Cela correspond, en termes d’informations, à environ 7 années de correspondances, plus de 4800 photographies et vidéos, mes messages Google Voice, plus de 500 articles enregistrés dans mon compte Google Reader pour mes études (lorsque j’ai fermé mon compte Reader d’origine pour tout regrouper dans mon unique compte portant mon nom, j’ai ré-enregistré plusieurs centaines d’articles et de flux moi-même, à la main, un par un dans ce nouveau compte, celui que vous avez fermé et dont j’ai maintenant perdu tous les articles). J’ai également perdu tous mes favoris, ayant utilisé Google Bookmarks.

J’avais migré mes favoris d’ordinateur à ordinateur pendant peut-être 6 ans, environ 200, et je les ai finalement tous envoyés sur Google Bookmarks, content d’avoir trouvé une solution pour les migrer et content de me préserver de leur perte. J’ai aussi perdu plus de 200 contacts. Nombreux sont ceux pour lesquels je n’ai pas de sauvegarde. J’ai aussi perdu l’accès à mon compte Google Docs avec des documents partagés et des sauvegardes de fichiers archivés. J’ai par ailleurs perdu l’accès à mon calendrier. Avec cela, j’ai perdu non seulement mon propre calendrier personnel avec des rendez-vous chez le médecin, des réunions et autres, mais j’ai aussi perdu mes calendriers collaboratifs que j’avais créés et pour lesquels plusieurs heures de travail humain ont été nécessaires, des calendriers communautaires qui sont maintenant perdus.

Aucun de ces calendriers n’était non plus sauvegardé. J’ai également perdu mes cartes Google Maps sauvegardées et mon historique de voyages. J’ai perdu mes dossiers de correspondances médicales et diverses notes très importantes qui étaient attachées à mon compte. Mon site web, un compte Blogger pour lequel j’ai acheté le domaine via Google et que j’ai conçu moi-même, a été aussi désactivé et perdu. Pensez-vous réellement que je ferais sciemment quelque chose qui mettrait en péril autant de données personnelles et professionnelles ? Au fur et à mesure que les jours passent, je suis certain que je vais prendre connaissance d’autres choses que Google a détruites dans la désactivation injustifiée de mon compte. Je suis seulement trop en colère en ce moment pour réfléchir correctement et tout passer en revue. Pourquoi quelqu’un confierait-il quoi que ce soit à “l’informatique dans les nuages” après ce que j’ai traversé ? C’est quelque chose qui me dépasse complétement.

Je voudrai aussi préciser que je suis en fait un client payant, au point que j’ai acheté mon domaine via Google et j’ai aussi acheté de l’espace de stockage supplémentaire.

J’aimerais attirer votre attention sur d’autres éléments : je suis en ce moment en train de soumettre ma candidature pour les études supérieures. Je recevais occasionnellement des courriels de professeurs et d’autres personnes que je n’attendais pas et dont je n’avais pas les coordonnées. Ceci entraînant qu’en plus de mes amis et de ma famille à l’étranger ou des gens qui ne pouvaient pas me joindre autrement, ces personnes recevront maintenant un message de Google leur signalant que mon adresse électronique n’existe pas. Et j’ose imaginer que certains d’entre eux n’auront pas le temps de trouver d’autres moyens de contacter un candidat à qui ils faisaient une faveur en faisant le premier pas.

J’aimerais attirer votre attention sur d’autres éléments : j’ai été ce que l’on pourrait appeler un supporter enthousiaste de Google en tant qu’entreprise. Étant un utilisateur de la première heure, on pourrait presque dire que j’ai été un apôtre du travail de Google. Google sortait ses produits prématurément, et je contribuais au feedback sur ces produits. Lorsque Google a réussi son coup politique en Chine en re-routant les serveurs vers Hong-Kong, j’ai applaudi et j’ai posté des articles à ce sujet sur tous mes réseaux sociaux, et j’ai fait la remarque, par ces mots, à plusieurs personnes que je connais : “ils l’ont fait avec classe et dignité”. J’ai également convaincu l’entreprise pour laquelle je travaillais de migrer vers Google Business Apps et d’utiliser les Google Apps pour à peu près tout. Je les ai aussi encouragés à acheter de l’espace de stockage avec Picasa pour construire notre base de données d’images. De plus, j’ai convaincu presque toute ma famille et mes amis d’ouvrir un compte Google ou Gmail dans les deux dernières années, et j’ai montré aux gens comment les utiliser et leur ai expliqué les bénéfices de Chrome sur les autres navigateurs. J’ai même des actions Google.


“S’il vous plait, aidez-moi, mon compte a été désactivé et je ne sais pas pourquoi !”


J’aimerais attirer votre attention sur d’autres éléments encore : je ne suis pas fâché que Google ait suspendu mon compte s’ils pensent qu’il a été corrompu, mais je suis absolument furieux qu’ils aient suspendu mon compte sans me prévenir, sans même me donner une raison, et sans me donner quelque moyen que ce soit pour le réactiver, et ensuite ignorer toutes mes tentatives de trouver un interlocuteur. Aucun autre prestataire de service Internet ne se comporte ainsi. Je comprends que Google ne puisse pas offrir de l’aide personnalisée pour chaque demande de ses utilisateurs, mais quand une société comme Google a pris une position de monopole sur des pans entiers de l’Internet, elle a le devoir de se montrer responsable envers leurs clients quand des évènements comme ceux-ci arrivent. J’ai utilisé tous les forums d’aide : en vain. Et cela n’a fait que me mettre davantage en colère. Je ne vais pas prendre la peine de citer toutes les conversations absurdes que j’ai eues, elles sont trop nombreuses et elles vont seulement me rendre de plus mauvaise humeur.

La goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est quand un “top contributeur” a déplacé le fil de la discussion du forum d’aide initial sur lequel je postais vers un autre forum sans ma permission. Puis, quelques jours plus tard, un autre “top contributeur” a laissé un message indiquant que le fil se trouvait dans le mauvais forum et a fermé la conversation, m’empêchant dorénavant au même titre que n’importe quelle autre personne d’y participer ou de faire des progrès. Les forums d’utilisateurs ne sont pas des sources d’information contrairement à ce que pense Google. Et la seule fois qu’un employé de Google a contribué dans mon fil, cela a été pour dire que ma question n’était pas posée dans le bon forum, et pour me dire que j’aurais dû poster dans le forum où je l’avais initialement placé. Cela s’est produit quand j’ai reposé sans arrêt les mêmes questions. En voici un exemple :

- Moi : S’il vous plait, aidez-moi, mon compte a été désactivé et je ne sais pas pourquoi !

- Utilisateur 1 : Connectez-vous simplement au tableau de bord et faites quelque chose.

- Moi : Je ne peux pas, mon compte a été désactivé.

- Utilisateur 2 : Salut, je viens juste de voir votre post. Pouvez-vous vous connecter à votre compte et me dire ce que quelque chose dit ?

- Moi : Mais puisque JE VOUS DIS que JE NE PEUX PAS me connecter à mon compte !

- Utilisateur 1 : Ok, ne vous énervez pas, pouvez-vous faire quelque chose qui implique que je sois connecté ?

- Moi : Mais NON ! Je ne peux pas DU TOUT me connecter à mon compte !!!

Puis la conversation a été fermée par quelqu’un et j’ai abandonné, après 5 jours. Je comprends la philosophie qui est derrière les forums modérés par les utilisateurs eux-mêmes. Mais dans de nombreux cas, les problèmes sont hors de portée des autres utilisateurs. Je ne demande pas comment activer les émoticônes dans une signature Gmail ou comment modifier ma photo de profil. Mon problème est un problème grave pour lequel une voie de secours sérieuse devrait être disponible. Je pense mettre le doigt sur une critique valide des insuffisances de l’aide gérée par les communautés d’utilisateurs en ligne. Google a mis en place une gestion type Ferme des Animaux sur son site avec des utilisateurs qui pour la plupart sont bien intentionnés mais complètement incapables de prendre des décisions à un niveau administrateur ou d’offrir de l’aide à un tel niveau.

Et cela peut fonctionner en douceur aussi bien pour l’utilisateur que pour l’entreprise, du moment que l’entreprise reste impliquée et prend ses responsabilités quand la résolution d’un problème est entièrement hors de portée d’un autre utilisateur. Google ne fait pas cela.

“Comme dans un cauchemar kafkaïen”

Je me fiche qu’un service Google soit gratuit. C’est Google qui adopte l’approche : “Vous n’aimez pas ? Tant pis, de toutes façons c’est gratuit”. Gratuit ou non, tous les utilisateurs sont dans l’orbite de Google et c’est en nous montrant des publicités que Google a gagné ses milliards de dollars. Il n’y a pas d’autre société cotée en bourse et du niveau de Google qui ne propose pas un support simple et complet à ses utilisateurs.

En plus des forums, j’ai également rempli tous les formulaires et demandes que j’ai pu trouver, et tenté de contacter chaque bureau et même chaque personne dans les deux bureaux de Manhattan. Mais pas une seule personne n’a été capable de m’aider, ce que je trouve choquant et exaspérant comme dans un cauchemar kafkaïen. Un employé m’a même répondu qu’il ne savait pas ce que je devais faire, ajoutant : “Honnêtement, je n’utilise même pas Google” !

Après avoir exploré tous les canaux possibles pour obtenir de l’aide, j’ai finalement été contacté tout à coup par un employé de Google qui a vu par hasard mes protestations sur Twitter, un service que j’ai utilisé suite à l’absence complète de support à la clientèle de Google. Il a dit qu’il allait essayer de contacter des personnes chez Google pour m’aider à restaurer mon compte. Après plusieurs échanges d’emails avec lui, il m’a rapporté qu’il avait parlé à quelqu’un de chez Google qui lui a dit que mon compte avait été désactivé, sans lui dire pourquoi. Il a essayé d’expliquer que ça devait être une erreur, mais ils ne pouvaient pas se l’expliquer eux-mêmes.

Alors Google, voici autre chose à laquelle je voudrais que vous réfléchissiez. L’un de vos propres employés est allé vers vous pour moi et vous a indiqué que vous aviez désactivé mon compte par erreur, et votre réponse a été : “non, on est presque sûr que non”. Votre propre employé a dit : “écoutez, j’ai parlé à cette personne et je pense qu’une erreur a été faite, vous devriez revérifier ou lui parler”. Et à nouveau, votre réponse a été “non, on est presque sûr”. Alors, posez-vous la question, quelqu’un comme moi qui a vu son compte être désactivé se lancerait-il dans une telle campagne vociférante et bruyante pour parler à quelqu’un de chez Google afin de leur expliquer qu’une erreur a été commise et que des années de données importantes ont été détruites, quelqu’un comme moi qui aurait volontairement mené des activités illégales sur son compte ferait-il cela ? Vous avez seulement besoin de bon sens pour répondre.

D’autres éléments : J’ai eu des comptes Hotmail, Yahoo, AOL et Compuserve et jamais l’un de ces comptes n’a été désactivé. Lorsque l’une de ces entreprises pensait que mon compte était compromis, elle m’en a averti et j’ai changé mon mot de passe. Pourquoi Google ne m’a-t-il pas notifié, à l’adresse email alternative que j’ai fournie à l’inscription, avant de prendre la décision de désactiver mon compte ? Cela me laisse perplexe. Si vous dites que j’ai violé certaines Conditions Générales d’Utilisation c’est votre droit, et dans ce cas il est justifié de résilier mon compte. Mais je vous demande maintenant un minimum de preuves de cette violation.

Concernant toute violation, je veux être tout à fait clair : je n’ai causé aucune infraction aux Conditions Générales d’Utilisation. Si Google pense que quelque chose a été fait de mon côté, je les défie de me dire ce que c’est. Je n’ai d’aucune façon violé de Conditions d’Utilisation, c’est un fait. Je voudrais signaler que quelques jours avant que mon compte ne soit désactivé j’obtenais des messages d’erreur quand j’essayais d’accéder à Google.com via Chrome. Je sais que je ne suis pas la seule personne que je connais à qui cela est arrivé. Mes amis et membres de ma famille utilisant Chrome obtenaient des messages d’erreur en essayant d’accéder à Google.com. Je pense que c’était des avertissements de redirections ou de certificat du site. J’ajoute que mon compte Google Plus se comportait de façon étrange lui aussi avant la désactivation de mon compte. Mais je lance des vérifications antivirus régulièrement et je n’ai jamais eu de virus. Une quelconque “violation perçue” est une méprise de la part de Google, ceci aussi est un fait.

La menace Google

Vous avez coupé mes moyens de communication, perturbé ma vie personnelle et professionnelle, détruit de larges parties de mes données personnelles et professionnelles, m’avez accusé de quelque chose sans me dire de quoi, avez bloqué toute communication directe avec mon accusateur, et ne m’avez donné aucune possibilité de faire appel de cette décision ou de parler à quelqu’un des faits connus dans cette affaire. Cette entreprise se dirige vers une voie très, très menaçante, si elle continue ainsi.

Plusieurs appels ont été faits à l’ONU pour que l’accès à Internet, aux communications essentielles et aux services d’information deviennent des Droits de l’Homme. En Grèce, en Espagne, en France et en Scandinavie, cela a déjà été accordé. Ce ne sera pas long avant que des lois ne soient mises en place concernant les comptes personnels utilisés pour accéder à ces services de communication et d’information, et des lois régulant la sauvegarde des informations personnelles contenues dans ces comptes, comme les correspondances. Il est impardonnable qu’une entreprise telle que Google, qui fait tant de déclarations sur les bonnes pratiques dans les domaines de la communication et de l’information, n’ait pas pris d’elle-même l’initiative et ait à la place choisi de traîner les pieds tant qu’elle n’y est pas contrainte par les gouvernements.

Les entreprises comme Google profitent des lois actuelles et écrivent dans leurs Conditions Générales d’Utilisation des choses telles que :

…vous accordez à Google le droit permanent, irrévocable, mondial, gratuit et non exclusif de reproduire, adapter, modifier, traduire, publier, présenter en public et distribuer tout Contenu que vous avez fourni, publié ou affiché sur les Services ou par le biais de ces derniers.
(NdT : Tiré directement de la version française)

Ces conditions ne sont pas viables et je ne doute pas qu’elles seront modifiées à un moment ou à un autre à l’avenir. De nombreux grands médias, tel que le Washington Post, ont déjà commencé à scruter Google et d’autres entreprises qui ont choisi d’imposer de telles drastiques conditions à leurs clients. Voir Google agir de la sorte est infect et inexcusable.

Et je m’inquiète réellement de l’avenir de la dissidence sociale et politique qui devra se battre pour exister dans l’œil du cyclone formé par les réseaux sociaux et l’actuelle politique de Google. Un climat dans lequel la Responsable de la Vie Privée chez Google, Alma Whitten, a encensé YouTube comme un moyen pour les activistes politiques de poster du contenu de manière anonyme. Quelques mois plus tard, une nouvelle décision interne éliminait tranquillement toute possibilité de publier anonymement.

“J’ai toujours été un apôtre et un fidèle de Google. Aujourd’hui c’est terminé.”


Je tiens aussi à mentionner qu’en aucun cas je n’ouvrirai un autre compte Google.

Comme je l’ai déjà dit, j’ai toujours été un apôtre et un fidèle de Google. Aujourd’hui c’est terminé. Je vais en finir avec les Google Apps qu’utilise mon entreprise et laisser tomber tous les autres produits Google que j’utilise, même les services comme Google News que je consultais auparavant plusieurs fois par jour. J’étais même sur le point de remplacer mon iPhone par un téléphone tournant sous Android. Au lieu de cela, je vais dépenser la même énergie que je consacrais à encenser Google à dénoncer cette entreprise que je considère désormais comme extrêmement nuisible et aux pratiques honteuses. Je vais écrire à mon sénateur, vendre mes actions et contacter ma banque à propos de l’argent que j’ai versé pour le domaine et l’espace de stockage qui sont à présent inaccessibles. Je vais faire pression sur Google par tous les biais possibles pour qu’ils m’expliquent ce qu’ils ont perçu comme une violation de leurs Conditions d’Utilisation. Ces conditions que Google nous présente lors de l’ouverture d’un compte : “Google se réserve le droit de clore votre compte à n’importe quel moment, pour n’importe quelle raison, avec ou sans préavis” ne sont pas des termes défendables (pour certains points, je pense qu’un tribunal pourrait conclure que ces termes sont inacceptables).

Google est une entreprise à qui les gens confient de nombreuses données personnelles dont ils dépendent fortement. C’est pourquoi Google doit fournir la preuve de ce qui cause la désactivation d’un compte. Une fois de plus, on ne peut pas prendre l’argent des gens et avoir un monopole sur des pans entiers de l’Internet sans montrer un minimum de responsabilité vis-à-vis de ses clients. J’ose espérer que Google sera forcé de fournir un moyen de récupérer ses données personnelles telles que sa correspondance ou ses contacts lors de la fermeture d’un compte.

Le fait que pour le moment Google n’offre pas cette option lorsqu’il désactive arbitrairement le compte d’un utilisateur ne fait qu’ajouter l’insulte aux dommages causés.

Quand je pense à tout le business que j’ai fait faire à Google, à tout l’argent que j’ai apporté à cette entreprise, à tous les gens que j’ai convertis de Yahoo ou d’Hotmail, à tous les prêches que j’ai faits envers Android, à tout le travail que j’ai consacré à la souscription de mon entreprise à Google Apps, ça me met en rage et je regrette tout ce que j’ai fait. Et je vais faire tout ce qui est humainement possible pour défaire toutes ces actions, ainsi que pour mettre Google sous pression pour qu’elle devienne une entreprise plus responsable.

Honte à vous et à vos associés ainsi qu’à vos employés qui tolèrent de telles pratiques d’entreprise déplorables, déshonorantes et répréhensibles !


Article initialement publié sur Framablog sous le titre “Google m’a tuer”.

Traduction Framalang : Marting, Slystone, Siltaar, Juu, Padoup et Goofy.

Illustrations Cc FlickR: tangi_bertin, gabrielsaldana, psd, dullhunk

Image de Une © Fotolia

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Émeutes de Londres: “ces jeunes savent qu’ils n’ont pas d’avenir” http://owni.fr/2011/08/11/emeutes-londres-temoignage/ http://owni.fr/2011/08/11/emeutes-londres-temoignage/#comments Thu, 11 Aug 2011 06:32:45 +0000 Jason Paul Grant http://owni.fr/?p=75925 MAJ: Retrouvez la vidéo, sous-titrée en français, de Darcus Howe interrogé par la BBC.


Ça ressemble à une scène de film d’horreur. Des jeunes en nombre envahissent les rues. Pillent, saccagent et détruisent Londres. La police, dépassée, tente de protéger les centres commerciaux alors que les jeunes continuent de faire ce qu’ils veulent.

La question est : pourquoi ? Pourquoi font-ils cela ? Que faire pour les arrêter ? Je ne pense pas vraiment qu’on veuille les arrêter, sinon nous serions déjà en train de leur parler. Où ces jeunes dorment-ils ? Où sont leurs parents ? Ils doivent bien dormir quelque part, ils viennent de quelque part… Au lieu de les laisser dormir nous devrions les réveiller dès maintenant pour qu’ils répondent à nos questions.

Qu’ai-je à apporter au débat ? Pour être clair, j’ai grandi dans un quartier pauvre de Londres, un endroit qui n’a pas été détruit par les jeunes parce qu’il n’y a rien à endommager, et ce malgré les 50 millions de livres investies en 2001 qui n’ont pas été dépensées pour quoi que ce soit d’utile dans le quartier. Est ce que l’argent promis par le Labour mais jamais investi correctement fait partie du problème ?

Lorsque j’ai grandi dans ce quartier, la criminalité était élevée, les adultes qui m’entouraient n’avaient pas de travail, je ne m’en rendais pas compte à l’époque mais la zone rassemblait des immigrés du monde entier. À l’école, nos professeurs essayaient de créer un endroit sûr où jouer mais étudier devient difficile lorsqu’on rentre chez soi et qu’il n’y a pas à manger. Pour l’anecdote, mon école primaire a pris feu il y a plus d’un an et aucune réparation n’a été entreprise depuis. Cela donne une idée de la façon dont les résidents de New Cross sont considérés.

aylesbury

Agir ou subir

Pour en revenir à mon histoire, lorsque j’étais adolescent, les gangs dominaient la rue. Celui qui n’était pas membre d’un gang se faisait voler, battre et était considéré comme un idiot. La situation se résumait à « agis ou subis ». Les adultes étaient occupés à leurs basses besognes, entraient et sortaient de prison ou d’hôpital psychiatrique, ou planaient sous les effets de la drogue et de l’alcool. Les jeunes grandissaient très vite dans le sud de Londres.

Mon histoire a commencé dans les années 1980 mais en 2010, trente ans plus tard, rien n’a changé. D’un côté, j’ai réussi à briser le cycle de la pauvreté et de l’isolement grâce à l’éducation. J’ai rencontré un professeur originaire du Pérou qui m’a encouragé à poursuivre mes études ce qui m’a mené à une licence puis à un master. J’ai parcouru le Royaume-Uni et j’ai voyagé dans la plupart des pays européens. J’ai travaillé pour certaines des compagnies parmi les meilleures du pays et j’ai vu comment l’autre moitié de la population vit.

C’était le vilain secret que nous ne voulions pas admettre. Je me souviens de Ken Livingstone, alors maire de Londres, célébrant la City qui avait transformé le centre d’affaires en havre fiscal. Certains gagnent encore des sommes d’argent phénoménales dont les habitants pauvres de la ville ne voient pas la couleur.

Les cercles que je fréquente aujourd’hui sont très éloignés de l’autre réalité. Ça n’est donc pas une surprise que nous n’ayons jamais prévu ce qui arrive aujourd’hui ou que nous ne comprenions pas pourquoi cela arrive. Je n’ai jamais voulu m’étendre sur ce sujet mais on m’a contacté pour me demander des informations, pour s’inquiéter de ma sécurité et de la façon dont Londres va gérer ce problème.

Quand la Norvège a connu une violente tragédie, le Premier ministre a appelé à « plus de démocratie, plus d’ouverture et plus de vie sociale » – je ne peux que craindre ce que Cameron va dire au sujet des émeutes.

Des centaines de jeunes, pas un policier en vue

Hier soir j’étais dans un pub du haut Islington avec un ancien camarade de la City University of London qui émigre en Jamaïque. La clientèle était composée de personnes civilisées qui travaillent dans les médias et parlent des émeutes de manière voyeuriste. Regardez ce que font ces jeunes, ils volent des télés.

J’aurais aussi bien pu me trouver en Australie ; j’étais tellement éloigné des événements se déroulant à Londres cette même nuit. J’ai ensuite rejoint le sud de Londres à vélo et je n’ai croisé aucune agitation sur mon chemin. En traversant Islington, Angel, Farrington, St Paul et le London Bridge, les rues étaient désertes. Aucun jeune en vue.

C’est quand je suis arrivé sur Old Kent Road que le film a commencé. Il y avait littéralement des centaines de jeunes en survet’ courant dans tous les sens, à chaque coin de rue des gens se rassemblaient. Les jeunes avaient pris le contrôle sans que personne ne les arrête et ne leur dise de rentrer chez eux.

Pour ceux qui ne connaissent pas Old Kent Road, il s’agit d’une zone très démunie où se trouvent les logements sociaux d’Aylesbury. Tony Blair y avait investi des millions mais les nouvelles autorités ont décidé de les démolir. Nous laissons tomber ces enfants. Il y avait un rassemblement de musulmans, qui venaient probablement de rompre le jeûne. Et deux cafés, l’un rempli de Somaliens, et l’autre de Maghrébins. Ces groupes d’hommes étaient heureux de se retrouver et ne prêtaient aucune attention aux jeunes. Il n’y avait pas un policier en vue.

émeutes

Alors que je me dirigeais vers New Cross, j’ai trouvé la police. Trois fourgons arrêtés pour interpeller un jeune. Cela paraissait vraiment étrange et je voulais leur dire que la route derrière moi était remplie de jeunes qui erraient dans les rues. J’ai poursuivi mon chemin, ne voulant pas m’impliquer.

J’ai traversé New Cross mais je voulais voir d’autres quartiers. J’ai donc poursuivi ma route jusqu’à Lewisham. Tout était désert le long du chemin. Tous les magasins étaient fermés alors qu’il n’était que 23 heures un soir de semaine. Quand je suis arrivé au centre de Lewisham, la police faisait son travail. Elle avait bouclé l’accès à tout le centre commercial, empêchant les gens de passer. J’ai continué mon chemin jusqu’à Catford et là encore, la police protégeait le centre commercial.

J’ai décidé de rentrer chez moi. Quand je suis arrivé mon portable était rempli de messages, d’e-mails et d’appels en absence. Ma batterie était à plat et mes proches désespéraient d’avoir de mes nouvelles. Ils étaient abreuvés d’émeutes à la télé.

Cela fait trop longtemps que nous méprisons ces jeunes

Pour être totalement honnête, c’est la première fois de ma vie que je vois une chose pareille. Les jeunes sont complètement perturbés et il n’y a pas d’explication rationnelle pour un tel niveau de violence. Le problème est qu’ils ne sont pas rationnels. Ils ne sont pas des gens éduqués qui pensent pouvoir dominer le monde. Ces jeunes ont vu leurs parents lutter et savent qu’ils n’ont pas d’avenir.

Je me souviens avoir travaillé pour un centre éducatif pour jeunes exclus du système scolaire traditionnel. Lors de mon premier jour je leur ai demandé ce qu’ils voulaient faire plus tard. La première réponse était dealer. Choqué, j’ai continué en leur demandant s’ils importeraient de la drogue de Colombie ou d’Afghanistan. Ils n’avaient jamais entendu parler de ces pays et voulaient vendre des petits sachets dans leur quartier. C’était comme ça qu’ils voyaient les adultes gagner de l’argent. J’ai alors suggéré qu’ils pourraient travailler dans la City, où des gens gagnent énormément d’argent. Personne ne lance de défi à ces jeunes ou ne leur permet de voir une autre réalité.

Cela fait trop longtemps que nous – la société – méprisons ces jeunes. Nous n’avons jamais voulu les prendre dans nos bras. Nous les avons diabolisés, exclus du système scolaire, laissés au chômage. Nous les avons enfermés puis libérés juste pour voir la même situation se répéter.

Je pense que les gens qui sont employés à s’occuper de ces jeunes devraient démissionner et permettre à ceux d’entre nous qui s’inquiètent vraiment de leur avenir de les changer. Les gens peuvent changer, et si nous n’y croyons pas alors nous avons un problème.

Je connais beaucoup de projets pour les jeunes et d’organisations très investies dans leur travail qui luttent pour avoir des fonds et doivent compter sur des volontaires pour être sur le front. Alors même que les élus touchent des salaires exorbitants et que les fonds investis ne sont pas dépensés correctement.

Je pourrais continuer mais je préfère m’arrêter. Allons nous réagir et être plus attentif ? Alors que nous nettoyons les rues de Londres demandons nous pourquoi ils agissent ainsi. La catastrophe est imminente. Que va-t-il se passer ce soir ? Quel sera notre futur ?

Darcus Howe, écrivain et journaliste, semble partager certaines des interrogations développées par Jason Paul Grant. La BBC a présenté ses excuses à l’auteur suite à l’interview.


Billet initialement publié en anglais sur le blog de Jason Paul Grant sous le titre “Attack of the Hoodies”

Traduction : Marie Telling

Illustrations FilckR CC PaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification par paul adrian PaternitéPas d'utilisation commerciale par Beacon Radio PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales par J@ck!

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Pourquoi j’ai quitté Abidjan http://owni.fr/2011/03/31/pourquoi-jai-quitte-abidjan/ http://owni.fr/2011/03/31/pourquoi-jai-quitte-abidjan/#comments Thu, 31 Mar 2011 16:30:48 +0000 Nemo http://owni.fr/?p=54602 Je suis Nemo, twittos ivoirien. Je ne suis pas journaliste, juste un cadre dans le privé à Abidjan. Je tiens également un blog. Pour des raisons de sécurité, je préfère utiliser un pseudo. Je suis devenu par la force des choses l’une des personnes les plus actives et les plus suivies sur le fil d’actualité twitter de la Côte d’Ivoire (#civ2010).

Ce fil a été créé en octobre 2010 par des Ivoiriens pour couvrir l’élection présidentielle maintes fois reportée depuis 2005. La campagne pour l’élection a été couverte et le fil a aussi servi à diffuser l’ambiance dans les bureaux de vote par les twittos volontaires. Ensuite, nous y avons relayé les résultats que la Commission Électorale Indépendante publiait en direct sur la Radio Télévision Ivoirienne (RTI). Et toute l’actualité de la Côte d’Ivoire a fini par y passer.

Je twitte, on me menace

Dans le cadre de mon travail et pour mon information, je vais beaucoup sur le terrain et j’ai des remontées d’information bien souvent avant la majorité des gens. J’ai suivi et relayé de très près les manifestations du 16 décembre 2010 à Abidjan où Guillaume Soro appelait les Ivoiriens à prendre d’assaut la RTI. Et j’ai souvent été là où les événements se produisent. Avec ma connexion mobile, je faisais rapidement des mises à jour sur Twitter. J’ai aussi des contacts dans les villes de l’intérieur de la Côte d’Ivoire avec qui j’échange de nombreuses informations.

Et je suis aussi un twittos engagé pour le respect de la démocratie, le respect du vote populaire, le respect de la dignité et des droits humains. J’ai donc des prises de position contre le président sortant Laurent Gbagbo. Vivant à Abidjan, j’ai souvent dénoncé les exactions des forces pro-Gbagbo commises dans la ville sur les populations civiles. J’ai été parfois sur le terrain et j’ai vu des affrontements, et bien d’autres choses horribles. J’ai relayé les abus des jeunes patriotes aux barrages à Abidjan.

Mon audience sur Twitter n’a fait que croître et je suis devenu contributeur sur Global Voices. Des personnes n’ont pas aimé cela et j’ai commencé à recevoir des mentions de mauvais goût sur Twitter :

  • Nemo, ça va chez xxxxx (le nom de mon employeur)
  • Nemo, ta femme est toujours chez xxxxx (le nom de son employeur)
  • Nemo et ta petite voiture rouge ?

Bref, des messages pour me faire comprendre qu’on me connaît et pour essayer de m’intimider. Je n’ai pas pris cela très au sérieux au départ. Et un jour je reçois un message direct me disant qu’on sait tout de moi et qu’on va me faire taire.

Le droit de tuer est donné à quiconque démasque un « rebelle »

Dans un environnement où les gens se font tuer pour rien, j’ai compris que j’étais en danger. En effet, à Abidjan en ce moment, le droit de tuer est donné à quiconque démasque un « rebelle ». Le rebelle, c’est toute personne qui s’oppose au pouvoir de Laurent Gbagbo. On a ainsi vu des personnes se faire brûler vives, d’autres tuées à coups de pierres. Pour les autres, des groupes de jeunes en cagoules conduits par des anciens leaders de la FESCI – Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire (pro-Gbagbo) – s’occupent à piller les domiciles.

Ainsi, sous l’œil bienveillant de la police, les domiciles de plusieurs personnes ont été saccagés, pillés et il y a même eu un drame chez Touré Amed Bouah. J’ai ainsi pu faire une liste non exhaustive des domiciles déjà visités :

  • Amichia François, maire de Treichville, et son père, Adama Toungara, maire d’Abobo et ministre des Mines et de l’Énergie
  • Charles Koffi Diby, ministre de l’Économie et des Finances
  • Albert Mabri Toikeusse, ministre du Plan et du Développement
  • le général François Konan Banny, la maison familiale de Jean-Baptiste Ekra
  • Adama Bictogo, Amadou Koné, Zemogo Fofana, Sidy Diallo, Sidiki Konaté, Meité Sindou, Mme Constance Yaï

J’ai compris qu’Internet était surveillé par des personnes proches de Gbagbo pour fournir les renseignements sur les cyber-activistes. Le jour où le porte-parole des Forces Nouvelles, Alain Lobognon, [ndlr : pro-Ouattara] a révélé son identité sur Twitter, son domicile a été pillé et les affaires qui n’ont pas emportées ont été saccagées par des miliciens pro-Gbagbo.

Sur Facebook, des individus et des groupes pro-Gbagbo ont été montés et des personnes s’adonnent à la délation en citant les noms des personnes à abattre. Des anonymes ont même fait la liste des personnes qui produisent des « tweets terroristes » et j’en faisais partie.

Dans le même temps, les affrontements dans la ville d’Abidjan se rapprochaient dangereusement de mon domicile. Et ayant déjà vu des maisons entièrement détruites par des obus, la crainte s’est installée dans mon esprit.

Mais j’ai commencé à avoir très peur lorsque les barrages filtrants ont fait leur apparition dans les quartiers largement favorables à Laurent Gbagbo tels que Yopougon et Port-Bouet. Sur ces barrages sauvages, des jeunes patriotes contrôlent les pièces d’identité des passants et peuvent avoir le droit de vie ou de mort, en plus du racket systématique. Les étrangers ressortissants de la CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest) ainsi que des ressortissants du nord de la Côte d’Ivoire en ont souffert. Ayant un patronyme nordique, j’ai dû limiter mes déplacements, mais j’avais quand même peur.

J’ai poussé un soupir de soulagement après les contrôles policiers et douaniers à l’aéroport

Des amis m’ont dit de faire attention et j’ai pris quelques dispositions : j’ai déménagé, changé mes habitudes, rendu mes profils anonymes, limiter mes déplacements, travail à domicile avec un VPN. Ensuite, vu la baisse drastique de nos activités au bureau, j’ai demandé mes congés et ma femme aussi. Dans l’immédiat, j’ai informé mon frère qui vit à l’étranger et j’ai pris toutes les espèces que nous avions pour payer les billets d’avion et le rejoindre.

À l’aéroport, je n’étais pas rassuré vu que des personnes sont régulièrement empêchées de sortir du pays. J’ai poussé un soupir de soulagement après les contrôles policiers et douaniers. C’est ainsi que je suis arrivé comme un réfugié à l’étranger laissant presque toutes mes affaires à Abidjan.

Les perspectives ? Je n’y pense pas trop ! Je suis déjà content de rentrer chez moi sans me demander si je vais recevoir de la visite musclée. Mais au fond mon cœur est à Abidjan avec mon emploi, mes affaires et tout le reste.

Retrouvez notre dossier consacré à la Côte d’Ivoire.

Crédits Photo FlickR CC : Y-Voir-Plus / Thomas Hawk

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http://owni.fr/2011/03/31/pourquoi-jai-quitte-abidjan/feed/ 15
Internet : Instrument de la contre-révolution Egyptienne ? http://owni.fr/2011/02/03/internet-instrument-de-la-contre-revolution-egyptienne/ http://owni.fr/2011/02/03/internet-instrument-de-la-contre-revolution-egyptienne/#comments Thu, 03 Feb 2011 07:30:56 +0000 François Hien http://owni.fr/?p=45040 Quand Internet est revenu ce matin au Caire, nous nous sommes dit :

Mais ils sont fous, pourquoi aujourd’hui ? On va tous se ruer pour poster en ligne ce qu’on a filmé cette semaine…

Le mouvement anti-Moubarak allait pouvoir de nouveau communiquer au monde la nature exacte des manifestations et des tentatives de répression. Al-Jazeera cesserait d’être le canal unique par où passerait les informations vers le monde. Les manifestants que j’ai croisés ce matin sur Tahrir Square me disaient : “Ils veulent qu’on rentre chez nous, devant notre écran. Ils ne veulent plus qu’on se réunisse ici.” Personne n’imaginait alors que le rétablissement d’internet, opportunément placé au lendemain du discours de Moubarak, aurait, au moins dans un premier temps, l’effet inverse de celui qu’a eu l’imposant activisme sur les réseaux sociaux avant la coupure. Tandis que les plus tenaces, les plus courageux des manifestants restaient en rue, les premiers statuts pro-Moubarak apparaissaient sur Facebook. Quand des amis français, pour la première fois joints depuis une semaine, m’apprennent que leurs contacts égyptiens affichent des éloges de Moubarak sur leur mur Facebook, je crois d’abord qu’ils plaisantent, ou que ces contacts se sont fait hacker leur compte. Malheureusement ce n’était pas le cas.

Ce matin j’ai marché dans plusieurs quartiers. Un homme est venu nous dire son amour pour Moubarak et à quel point l’intervention de la veille l’a satisfait : sa volonté de nous convaincre dissimulait mal son statut d’agent du gouvernement. Ils ont toujours été nombreux ici, en civil, à prendre part aux discussions comme de banals passants pour débiter la propagande officielle. Et ils ne trompent personne : pas un cairote qui ne les reconnaisse immédiatement. Pas de raison de s’inquiéter, donc.

Un peu plus tard je croise une première manifestation pro-Moubarak. Ils sont quinze, tous des hommes, à bloquer la circulation. J’en retrouve une petite dizaine, ça et là, de ces manifestations de soutien au dictateur, toujours clairsemées et composées de policiers en civil, immédiatement identifiables, qu’entourent quelques adolescents qu’on imagine payés. A distance des policiers en uniforme les protègent, ce qui semble de bonne augure. Si ces pitres isolés doivent être protégés par la police – pour la première fois redéployée massivement aujourd’hui – c’est qu’ils sont bien faibles. Je passe un peu plus tard sur Tahrir Square, la grande place centrale où depuis plus d’une semaine maintenant cette révolution a établi sa permanence.

Aux abords de la place, plusieurs groupes semblent suspects, regardant de travers un étranger se rendant sur les lieux de la manifestation. On m’a dit souvent de faire attention : non pas pour ma sécurité, mais pour éviter que le mouvement apparaisse manipulé par des forces étrangères. L’arrestation d’un français par la police servirait au régime à communiquer sur l’influence étrangère. Il existe une vaste population sous-éduquée en Égypte dont l’unique source d’information consiste en la télévision nationale, avec laquelle ils ont un rapport dont l’ambiguïté ne lasse pas d’étonner : ils savent bien, évidemment, qu’elle leur ment ; mais tout de même, ils ont dit que les étrangers manipulaient les manifestants, et si c’était vrai ? Autant ne pas leur offrir sur un plateau la preuve qu’ils attendent et dont la télévision nationale ferait son beurre.

Je décide de passer tout de même rapidement à Tahrir Square ce matin, simplement pour jauger l’ambiance.

Les tanks entourent complètement la place depuis quelques jours, énorme masses inertes au cœur de toutes les interrogations : qui cette puissance de feu décidera-t-elle de servir ? Les soldats appartiennent au peuple. Jeunes garçons sympathiques, ils se font offrir des gâteaux et des bouteilles d’eau par les manifestants. Je les ai sentis gênés au début, appréhendant peut-être le rôle qu’on leur ferait jouer contre cette masse où ils ont sans doute de la famille ou des amis. Depuis qu’il y a deux jours le chef d’état-major a annoncé qu’en aucun cas il ne tirerait sur le peuple égyptien, les soldats semblent plus détendus. Ce matin, ils me saluent gentiment mais n’acceptent pas d’être filmés. Certaines rues sont totalement bloquées et ne permettent plus de rejoindre la place. On n’y accède que par des check-point où de simples citoyens vérifient nos pièces d’identité et nous fouillent. Là, comme dans les quartiers la nuit, l’armée venue faire respecter l’ordre collabore avec les comités de citoyens spontanément crées pour suppléer à la disparition subite de la police, il y a quelques jours.

Comme d’habitude, le regroupement sur la place est familial, bon enfant, très mélangé. J’arrive pendant la prière et le silence qui l’entoure, respecté par tous y compris ceux – majoritaires – qui ne la font pas, est impressionnant. Depuis l’installation des amplificateurs, la place s’est structurée en ses diverses tendances, sans pour autant que le sentiment d’unité ne s’estompe. Les Frères Musulmans ont à présent leur coin, relativement modeste, et m’accueillent comme d’habitude avec chaleur, jurant qu’ils ne veulent pas tirer la couverture à eux, qu’ils sont démocrates, qu’il n’y a qu’un seul peuple ici… Plusieurs personnes, ailleurs, me disent leur détermination : ils ne lâcheront pas, Moubarak n’a rien compris, ses gages de démocratie arrivent trop tard. Je signale à l’un d’eux les manifestations pro-Moubarak que j’ai vues ainsi que les types louches aux abords de la place. Avec le calme et la bonhommie qui caractérisent ces manifestants depuis le début, il me répond : “Si des pro-Moubarak viennent, on leur dira qu’ils ont le droit de penser ce qu’ils veulent mais que cette place est investie par ceux qui sont contre lui. On les raccompagnera à la sortie…” Il m’assure qu’il en a déjà repéré quelques uns, pour l’instant simples infiltrés. Plusieurs choses m’inquiètent cependant : des soldats armés au milieu de la place. D’ordinaire, ils ne s’y promènent que sans arme. Et trois longs camions militaires qui se garent sur un coin de la place sans que j’en comprenne la raison.

La contre-révolution a commencé.

Je rentre à l’appartement et les nouvelles tombent : les soi-disant manifestants pro-Moubarak ont surgi des rues adjacentes et ont investi la place. La contre-révolution a commencé. Des policiers sur des chameaux dispersent les manifestants. Nous voyons des projectiles fuser au-dessus de la foule. Les questions affluent : ces chameaux sur la place, comment ont-ils pu entrer ? L’armée a-t-elle sciemment laissé passer des éléments dont elle connaissait le rôle ? Comment a-t-elle pu convaincre les hommes qui l’assistent, profondément responsables et anti-Moubarak, de créer des exceptions à leurs drastiques consignes ? Je finis par douter de ce qui, jusqu’alors, me rassurait : les fouilles à l’entrée étaient censées garantir qu’aucune arme n’entrait sur la place. Peu à peu, la violence gagne en puissance. Le jour tombe, le feu envahit un bâtiment.
Nous sommes proches de la place Tahrir où les affrontements sont en train de faire des centaines de victimes. Au bout de la rue, des milliers de manifestants pro-Moubarak se dirigent vers la place. Les encerclés de Tahrir appellent le million de manifestants d’hier à les rejoindre. Mais ceux d’hier, je les connais pour les avoir longuement filmés : familles, enfants, pacifiques protestataires… Ils ne sont pas du genre à rejoindre une bataille dont la télévision leur révèle la violence. Par contre, ceux qu’on appelle les “baltagueya”, ces repris de justice employés par la police pour exécuter, en civil, les plus viles actions, affluent vers la bagarre, prêts à castagner. La révolution, pour un moment, revient à ce par quoi elle avait commencé : ceux qui restent sur la place, qui ont continué à manifester envers et contre tout, sont les mêmes qu’au premier jour quand il semblait impensable, tant c’était dangereux, de manifester sous Moubarak. Ils n’ont pas peur d’être frappés, ils y retournent. Ceux qui, on les comprend, ne peuvent pas s’offrir le luxe de mourir sous les balles du tyran, ayant une famille à nourrir, un commerce à faire tourner, ont été perdus entre temps. Bientôt, ne restera-t-il plus que les activistes du début que le régime n’aura qu’à cueillir, à enfermer, à faire taire, donnant ainsi le ton de la prétendue “période de transition” annoncée par Moubarak hier ?

Ils n’ont pas peur d’être frappés, ils y retournent.

La vermine est revenue. Pendant quatre jours la police avait disparu, interrompant momentanément la quotidienne mécanique de corruption et de répression par laquelle tient le régime. On se disait : certes les égyptiens ont besoin de police et elle doit revenir, mais jamais la population du pays n’acceptera qu’elle ait de nouveau recours à ses anciennes méthodes. Les policiers reviendront la tête basse pour assurer la circulation et une sécurité minimale. La société civile, parfaitement organisée, puissante et créative, a su prouver que les éléments de désordre lui étaient extérieurs. Livrée à elle-même dans une situation d’urgence, elle a fait jouer les obscurs rouages de son architecture sociale complexe, qui jamais ne s’est confondue avec la machine étatique, pour maintenir la société contre la police, la nation contre l’état.
Nous avions tort, malheureusement. La vermine policière n’a pas abdiqué sa capacité de nuisance.

S’il y a bien une chose claire dans cette situation, c’est la distribution de la violence : elle est exclusivement du côté du régime ou de ses divers supplétifs. On hésite à émettre une opinion aussi peu nuancée, on voudrait être sûr de ne pas angéliser un mouvement de protestation qui pourrait, lui aussi, faire usage de violence. Et pourtant c’est un fait : ce sont les policiers en uniforme qui ont attaqué des manifestants pacifistes dont la réaction consistait à prier face à leurs menaces ; ce sont des policiers en civil qui, se faisant passer pour des vandales afin d’accréditer l’alternative “Moubarak ou le chaos”, ont attaqué des quartiers que leurs habitants ont décidé de défendre eux-mêmes ; ce sont aujourd’hui des policiers en civil qui, se mêlant progressivement aux manifestants de Tahrir, ont commencé à attaquer.

Qu’ont-ils en face d’eux ?

Des manifestants d’une maturité politique ahurissante, extrêmement conscients de l’image qu’ils renvoient, nettoyant ce qui était devenu “leur”place, taisant pour un temps leurs désaccords ; des comités de quartier organisés spontanément le jour même des premiers vandalismes commis par la police en civil, armés de manches à balais et de couteaux de boucher et respectant scrupuleusement les instructions données par l’armée…

Moubarak a déclaré la guerre à sa propre société. Ne pouvant compter sur aucun soutien réel dans sa population, mis à part le très faible pourcentage de profiteurs du régime, il est forcé de s’en inventer, organisant des spectacles de rue prétendument favorables à lui et dont le moindre manifestant est payé. La dictature, depuis longtemps habituée à substituer au réel la fiction, paie les habitants qui la soutiennent, les manifestants qui se battent pour elle et les journalistes qui en écrivent l’histoire. Le plus grave n’est pas ça : qui pouvait attendre de ce régime qu’il change ses méthodes ? Ce qui est le plus inquiétant, c’est que le mouvement de protestation ne semble plus aujourd’hui véritablement soutenu par la population.

Le pacifisme qui caractérise cette société – et au nom duquel elle s’était déterminée à vouloir faire chuter Moubarak – l’incite maintenant à blâmer les derniers manifestants pour leur insistance – ceux-là mêmes qui se font tuer par les “baltagueya” en ce moment. Ne pourraient-ils se contenter des améliorations déjà acquises ? Le timing de la coupure d’internet a été parfait. Sur les réseaux sociaux, cet après-midi, les réactions sont de ce type : “les gens qui avaient de vraies demandes sont partis hier après le discours de Moubarak, ceux qui restent à Tahrir sont des voyous et des gens qui veulent devenir vizir à la place du vizir”… Aussi vite qu’il s’était engagé aux côtés des manifestants, le peuple s’est retourné et la rapidité de ce changement de situation est dûe, pour une grande part, à la réapparition des réseaux sociaux, substituant à la chaleur des rassemblements collectifs et transversaux les informations erronées infusées sur la toile par le gouvernement.

Internet est donc devenu l’instrument de la contre-révolution, au moins le temps d’une journée.

La fétichisation des réseaux sociaux par la presse française suite à la révolution tunisienne est problématique. On peut faire ce qu’on veut d’internet et force est de constater que les clivages d’opinion n’y sont pas transcendés. La dictature, tout autant que les manifestants, a su comprendre le profit à tirer des réseaux sociaux. Moubarak n’est pas Ben Ali, son intelligence tactique s’est adaptée aux réalités nouvelles de l’information virale. Si sa télévision nationale ressemble à ce que devait être la chaine unique sous Brejnev, la réalité qu’elle s’efforce de promouvoir est relayée de la façon la plus moderne. Plus efficace encore que les outils de propagande les plus éculés, secondée par une répression qui limite toute prise d’information directe, Internet sait transformer les héros en voyous.

François Hien,
le 02 Février à 14h

Crédit Photo Flickr CC : Mahmoud Saber / Gr33nData / Nasser Nouri

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LEGO, nous nous sommes tant aimés, et ça continue http://owni.fr/2010/06/08/lego-nous-sommes-tant-aimes-et-ca-continue/ http://owni.fr/2010/06/08/lego-nous-sommes-tant-aimes-et-ca-continue/#comments Tue, 08 Jun 2010 08:07:38 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=16672

Wagon Train (photo DR -Gareth-)

-Gareth-, auteur de The Year of the Fett, un projet “365″ (une photo par jour pendant un an)

Aussi loin que je m’en souvienne, LEGO a toujours fait partie de ma vie. J’avais plusieurs boîtes quand j’étais petit – qui ont depuis pendant longtemps été emballées sur des étagères mais qui, ces derniers temps, ont lentement refait surface, comme je me consacre plus à la photographie de jouet.

Je dirais que j’aime LEGO en raison des possibilités sans fin, en particulier avec la photographie. Tu peux construire ton jeu ou simplement placer les figurines dans le monde réel. Les figurines LEGO ont la capacité de représenter énormément d’émotions sans en fait être capable de bouger, tourne la tête et tu as une nouvelle expression ! Et avec les nouvelles boîtes qui sortent, je ne vois pas LEGO disparaître bientôt.

Pierre Charles, ingénieur mécanicien et secrétaire de l’association Freelug (French Enthusiast LEGO© User Group)

J’ai commencé tout petit avec les Duplo (autour de 3 ans), je suis ensuite passé rapidement aux LEGO system vers 5-6 ans. J’étais plus intéressé par le thème “Ville” (appelé “city” maintenant par LEGO) et j’adorais construire des voitures. Les LEGO System ne m’ont jamais quitté, mais vers 9-10 ans j’ai commencé à entrer dans les LEGO TECHNIC, avec leurs engrenages et leur moteurs.

Ceux sont ces modèles TECHNIC qui m’ont fait m’intéresser à la mécanique, ce qui m’a poussé à passer par un lycée technique en filière S option Science de l’Ingénieur plutôt que dans un lycée généraliste en S option Bio. Et donc naturellement je me suis dirigé vers une école d’ingénieur dans laquelle je pourrais parfaire mon intérêt pour les sciences appliquées et plus particulièrement la mécanique (je suis ingénieur INSA de Lyon INSA étant Institut Nationale des Sciences Appliquées).

J’ai fait une pose dans les LEGO de 16-17 ans jusqu’à 19-20 ans. Après les LEGO qui me créent ma vocation, ma vocation me renvois vers eux, puisque je me suis remis activement dans les LEGO après avoir découvert les LEGO Mindstorms (LEGO TECHNIC programmables) dans mon école.

Maintenant que je suis revenu à ma passion d’enfance, je suis retombé dans mes premiers amours, les LEGO System. C’est plus dépaysant pour moi que les LEGO TECHNIC par rapport à mon travail.

En journée, Pierre Charles est ingénieur mécanicien. Pour se détendre, il plonge dans la brique. Cela donne par exemple un wagon transporteur de fonte en fusion, qui servait dans sa région natale à transporter les métaux en fusion du haut fourneau à l'aciérie.

Brendan Powell Smith, aka the reverend, auteur de The Brick Testament

J’aime LEGO car il te permet d’exprimer si bien ta créativité personnelle. Enfant, la moitié du plaisir, c’était la construction, l’autre, le jeu avec les amis et l’élaboration d’histoires autour de tes créations. L’adulte que je suis ne “joue” pas beaucoup avec le LEGO mais j’aime encore construire, et je raconte toujours des histoires, mais d’une manière différente. Maintenant, trente ans après, le nombre de figurines est devenu beaucoup plus important, je peux faire des choses comme créer des représentations crédibles de Moïse, Jésus, de soldats romains, et même de Dieu. Les possibilités de constructions sont si formidables que je peux créer un univers entier en LEGO que ces acteurs en LEGO habitent.

Renalid, chef de projet chez ijenko.com

J’ai été plongé dans les LEGO dès mon plus jeune âge, au début années 80. J’ai pu alors au fil des années découvrir les différents univers que la marque danoise a mis en place : LEGO Espace, Moyen-âge, City… puis les LEGO TECHNIC. Toutes les pièces, éléments ou personnages des boîtes d’origine sont en fait le point de départ d’une reconstruction permanente. Notre créativité est alors stimulée, c’est un vrai catalyseur pour son imagination… Que ce soit pour créer des histoires ou pour fabriquer le robot ou le bateau de nos rêves. Les possibilités sont infinies contrairement à Playmobil où il n’y a pas de jeu de construction ou Meccano qui s’adresse à une classe d’âge plus vieille.
Trente ans après, c’est avec envie et nostalgie que je me replonge dans les catalogues LEGO, surtout avec les LEGO Star Wars… Mix de deux univers de légende :-)
Volontairement ou non et sûrement par nostalgie mon environnement présente quelques références LEGO : mon avatar sur le Web est un minifig LEGO, j’ai acheté sur Etsy un sticker LEGO pour mon MacBook ou encore un tee-shirt avec le légendaire LEGO Espace des années 80. :-)

En bon sujet de sa majesté, Mike Stimpson aka Balakov fait boire du thé avec un nuage de lait aux stormtroopers.

Mike Stimpson (GB), programmeur et photographe, aka Balavok

Je joue aux LEGO depuis mon enfance, les figures miniatures et les infinies possibilités de construction m’ont toujours attiré. Les Playmobil n’ont jamais été aussi populaire en Grande-Bretagne, du moins pas à cette époque-là.

Ces nombreux clichés de LEGO sont visibles sur son site personnel et sa page Flickr Balakov

Damien Douani, social media guru et membre éminent de la communauté d’OWNI /-)

Pourquoi j’aime les Legos ? Pourquoi… Hum… En fait, je crois que cela vient d’un traumatisme infantile. J’ai eu à choisir. Il y a deux écoles : les LEGO et les Playmobil. J’ai eu les deux, et j’ai choisi mon camp : les LEGO ! C’est tellement plus puissant pour l’imaginaire et la créativité, rien n’est “prévu” par avance, ce n’est pas figé. Une brique peut avoir mille utilisations, être une petite part d’une grande construction, ou bien être la construction elle-même. Les usages sont infinis, on peut faire, défaire… et créer son univers. Ce que j’ai fait d’ailleurs. Ah ah ! Oui, j’ai CRÉÉ. Une immense ville de plusieurs mètres carrés, que j’ai encore à ce jour. Des années à la paufiner, la préciser, la ciseler. Il m’arrive encore d’y jouer… et même d’aller rôder dans les rayons des magasins de jouets pour voir les nouveautés. On ne sait jamais, si je repassais à l’acte… C’est grave docteur ?… Docteur ?

Richard Lemeiter, architecte, trésorier de FreeLUG

Comme le dit l’un de nos confrères : “on a l’âge de nos LEGO” et en fait au plus loin que remontent mes souvenirs, le LEGO est là.

Et je faisais un aller/retour entre le LEGO et mon métier, car l’idée de devenir architecte m’est venue à 9 ans, âge d’or, où dans ma chambre le tout LEGO régnait… Le fait de construire des trains mais surtout tout autour des gares, ponts et maisons,… le LEGO m’avais permis dans un premier temps de pouvoir développer l’imagination dans mes constructions et la visualisation mentale en “3D” des assemblages , chose qui m’a beaucoup servi ensuite dans mes études.

Durant mes études, le fait d’avoir ressorti mes LEGO pour faire quelques maquettes de projets fut un vrai plaisir. Et là j’ai pris conscience des énormes possibilités d’assemblage qu’offraient toutes les nouvelles pièces apparues depuis ma adolescence et que j’avais un peu perdu de vue.

Et aujourd’hui, ayant “replongé” très fortement dans l’univers de la petite brique danoise, mon expérience professionnelle, me permet presque de “voir” en LEGO un bâtiment que je souhaite reproduire. Je le visualise dans la tête, je dessine mes idées d’assemblage dans mes petits carnets de croquis (comme pour mes projets réels) ou je manipule le logiciel mlCAD, l’équivalent d’ArchiCAD ou AutoCAD qu’emploie les architectes, mais pour modéliser virtuellement et en 3D mes projets LEGO avant de passer à la réalisation.


Photo CC Flickr p_a_h

Image de une CC Flickr BreS’

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Bruit, rumeur et information http://owni.fr/2010/03/19/bruit-rumeur-et-information/ http://owni.fr/2010/03/19/bruit-rumeur-et-information/#comments Fri, 19 Mar 2010 09:02:32 +0000 Erwan Alix http://owni.fr/?p=10398 rumeur

Photo CC Yung GrassHopper sur Flickr

Ce 18 mars était une journée animée sur le front de l’info et du web à Rennes. A 11h39, une forte détonation a été entendue dans la ville et alentours. Le web local s’est enflammé. L’occasion de parler de bruit, de rumeur et d’information.

Pensez-vous que cette illustration sert ou dessert le billet ? Je  me pose la question...

Pensez-vous que cette illustration faite à la main sert ou dessert le billet ? Je me pose la question…

Il était donc 11h39 ce matin lorsque de nombreux Rennais ont entendu un gros boum, et pour certains, ressenti une vibration. Dès 11h41, un utilisateur de Twitter demandait si d’autres twitterers avaient entendu ce bruit. Il était retweeté à plusieurs reprises dans l’heure de midi.

J’étais à Chantepie, et moi je n’ai rien entendu. J’ai vu cette rumeur sur Twitter en début d’après-midi, qui m’a mis les sens en alerte… En effet, nous avons eu plusieurs cas similaires dans l’Ouest – avec au final des avions franchissant le mur du son – et à chaque fois, c’est une avalanche de réactions.

Rumeur ou information ?

Vu le tour que les choses prenaient sur Twitter, nous avons cherché à vérifier qu’il ne s’agissait pas d’un fake. Les nombreux tweets mentionnant l’explosion étaient pour l’essentiel des retweets provenant de deux sources. C’était un peu léger. Nous avons donc cherché à vérifier en appelant des connaissances résidant à l’est de Rennes. Dès le premier coup de fil, une personne de confiance nous a confirmé avoir entendu un boum suivi d’une vibration, en fin de matinée. Simultanément, d’autres personnes témoignaient sur Twitter.
Nous avons donc commencé par mettre en ligne un appel à témoin : « Avez-vous entendu un boum à 11h39 ? », avec les précautions du conditionnel (un bruit aurait été entendu…)… En dix minutes, nous recevons dix témoignages concordants, localisés à Rennes et ses environs. Il y a donc bien eu un bruit.
Nous avons donc augmenté la visibilité de l’appel à réaction, et sollicité les abonnés de notre base par un mail d’alerte, afin qu’ils témoignent. Ça c’est la moitié de notre travail de journaliste web. Dans le même temps, nous nous sommes efforcés d’accomplir l’autre moitié de notre travail : vérifier l’info et trouver l’explication.

Nous avons donc commencé par mettre en ligne un appel à témoin : « Avez-vous entendu un boum à 11h39 ? », avec les précautions du conditionnel (un bruit aurait été entendu…)… En dix minutes, nous avons reçu dix témoignages concordants, localisés à Rennes et ses environs. Il y a donc bien eu un bruit.

Nous avons ensuite augmenté la visibilité de l’appel à réaction, et sollicité les abonnés de notre base par un mail d’alerte, afin qu’ils témoignent. Ça c’est la moitié de notre travail de journaliste web. Dans le même temps, nous nous sommes efforcés d’accomplir l’autre moitié de notre travail : vérifier l’info et trouver l’explication.

Le réflexe traditionnel serait de chercher d’abord à identifier le pourquoi du bruit, pour ensuite rédiger un bel article et édifier les masses ignorantes en leur dévoilant l’origine du boum qu’elles ont entendu. Seulement, la réactivité du web rend aujourd’hui caduque la position des vieux médias (presse, radios, TV) quant à la gestion des rumeurs publiques. Auparavant, lorsque ces médias étaient les seules caisses de résonance, la rumeur restait cantonnée aux cafés du commerce. Maintenant, elle enfle publiquement à grande vitesse via les réseaux sociaux. J’estime que le journaliste ne peut plus prendre le temps de la vérification d’une rumeur dans le silence. Son existence même est une information.

Attention, je parle là d’une rumeur sur un fait survenu dans le domaine public (type « on a entendu un gros boum à Rennes »), pas d’un ragot. En l’occurrence, sans mauvais jeu de mot, il vaudrait mieux parler de « bruit » que de « rumeur », connoté péjorativement.

Nous avons donc naturellement invité nos internautes à parler de ce boum entendu et à livrer leurs témoignages, avant même d’avoir l’explication. Le rôle d’un site web d’info locale est d’être le lieu d’échange et de discussion, d’épanchement aussi pour tous ceux qui ont envie de dire « moi aussi je l’ai entendu ce bruit à 11h39 ! ». J’estime que le nombre de commentaires reçus légitime cette position (plus d’une centaine dans l’après-midi).

Le bruit reste un bruit

Une fois la machine à témoigner lancée, quasi en même temps en fait, nous nous sommes attelés à avoir l’explication de bruit. Les coups de fil au Réseau National de Surveillance Sismique et à l’armée n’ont pas permis de découvrir l’origine de ce boum, entendu de Bédée à Vitré, dans quasiment toute la partie centrale du département. Il faut avouer que nous n’avons pas le carnet d’adresse de certains, et peu de pratique des services de communication de l’armée de l’air. Et si nous sommes sûrs à 95 % qu’il s’agissait d’un avion franchissant le mur du son, nous n’avons pas de version officielle.

Nous avons reçu beaucoup de témoignages, il y a eu plein de tweets, mais comme le souligne très justement Alter1fo, c’était un peu « beaucoup de bruit pour rien » ! La plupart indiquent avoir entendu un bruit à tel ou tel endroit, mais rares sont ceux qui essaient d’ajouter une plus-value. Toute cette agitation 2.0 n’a pas permis d’avoir le pourquoi de la déflagration.

Ce n’était pas non plus complètement inutile. Certains internautes apportaient chez nous des éléments d’information intéressants (précédents de bangs supersoniques, couloirs aériens,…), et la variété des localisations géographiques permettait également de se faire une idée de l’étendue de la zone dans laquelle a été entendu le boum.

Mais le nombre des commentaires n’a pas permis d’avoir l’explication exacte. Et tous autant qu’on est, on attend de voir demain dans Ouest-France s’il y aura une version officielle… Pour l’instant, malgré nos efforts, le bruit est resté un bruit. Sur Alter1fo, du fait de l’absence d’explication, le bruit de ce matin est maintenu au grade de rumeur, dans le billet et dans certains commentaires. Comme s’il n’avait pas vraiment existé, malgré les témoignages.

Ça montre l’une des limites de l’info participative.

EDIT (19/03 – 11h00) : Dans Ouest-France ce matin, un entrefilet tout maigrichon, reprenant les infos ayant circulé en ligne sans mentionner leur origine. Et pas d’explication non plus. Ça montre bien les limites de la presse traditionnelle…

Billet initialement publié sur le blog d’Erwan Alix

Benoît Raphaël a rédigé récemment un billet sur Twitter et la rumeur à propos de “l’affaire Bruni-Biolay”

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